Ewenn était retournée dans sa ville natale ce matin-là.
Son âme n'était plus la même, elle souffrait de l'absence de Sharael, et elle ne se faisait pas à l'idée de le perdre. Elle déambula dans les rues de Celondim.
Le soleil était bien haut quand elle décida d'aller se baigner, il n'y avait personne, elle se déshabilla et elle offrit son corps à l'eau.
Elle nagea tranquillement, elle pensait à leur première rencontre et ses yeux, ses yeux d'un bleu azur...
Elle sourit en pensant comment elle lui avait appris ses sentiments très maladroitement, mais au moins il savait.
A nouveau ses yeux se remplirent de larmes, elle sortit de l'eau et elle enveloppa son frêle corps dans sa cape. Elle s'assit dans l'herbe et elle murmura :
Ô fins d'automne, hivers, printemps trempés de boue,
Endormeuses saisons ! je vous aime et vous loue
D'envelopper ainsi mon coeur et mon cerveau
D'un linceul vaporeux et d'un vague tombeau.
Dans cette grande plaine où l'autan froid se joue,
Où par les longues nuits la girouette s'enroue,
Mon âme mieux qu'au temps du tiède renouveau
Ouvrira largement ses ailes de corbeau.
Rien n'est plus doux au coeur plein de choses funèbres,
Et sur qui dès longtemps descendent les frimas,
Ô blafardes saisons, reines de nos climats,
Que l'aspect permanent de vos pâles ténèbres,
- Si ce n'est, par un soir sans lune, deux à deux,
D'endormir la douleur sur un lit hasardeux.
Elle regarda l'astre lumineux, elle se sentait de nouveau lasse, elle s'endormit en serrant dans sa main la bague à la rose.